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Umar Timol

No. 81 / Julio-agosto 2015


Umar Timol
(Traducido por Rocío Ugalde)


Sang

Tu es belle. Et je suis fou.

Corps de pierre. Corps solaire. Corps solitaire. Lactescence estivale. Echancrure sauvage. Tu es ma chair d’ivoire. Astre noir. Mon obscène territoire. Tu m’emmures sous le dôme des lamentations. Ma succulence permise. Ma maîtresse. Ma connivence sensuelle. Ma lunaire tyrannique. Princesse endiablée. Lacis de sueur. Idole enrobée de soie. Et d’épines.

Œuvre de feu et de sang. Les aréoles de tes lèvres épousent et entaillent ma peau. Assèche-moi. Je suis désert. Flagelle-moi. Je suis esclave. Inféode-moi. Je suis ta propriété. Ton bibelot. Je plisse ta nuque. J’éploie ton ventre. Dunes célestes. Ta chevelure est une liasse de flammes. Tes yeux un ouragan de sable. J’éventre ta langue engorgée et me désaltère. Elle est hostie pour ma bouche infidèle. Elle est calice pour ma bouche hérétique.

Je renonce au devoir. A la raison. Je suis dévot aux lieux de la débauche. Je suis mendiant au seuil de ta taverne. Je m’abreuve aux sources hallucinées. Opium et vin. Je renifle tes arômes opiacés. Je mords tes ébréchures alcoolisées. 

Je suis celui revêtu de guenilles qui lave et baise tes pieds. Je veux boire. Encore boire. Encore boire. Et me dissoudre sous les osmoses de l’ivresse.

Je suis amant de l’amour. Celui revêtu de laine. Celui revêtu de crasse et de boue.

 

Sangre

Tú eres hermosa. Y yo estoy loco.

Cuerpo de roca. Cuerpo solar. Cuerpo solitario. Lactescencia estival. Ensenada salvaje. Eres mi carne de marfil. Astro negro. Mi obsceno territorio. Me apresas bajo el domo de las lamentaciones. Mi suculencia permitida. Mi amante. Mi complicidad sensual. Mi tiránica selenita. Princesa poseída. Laberinto de sudor. Ídolo bañado de seda. Y de espinas.

Obra de fuego y sangre. Las aréolas de tus labios desposan y hienden mi piel. Sécame. Soy desierto. Azótame. Soy esclavo. Vuélveme tu feudo. Soy tu propiedad. Tu juguete. Pliego tu nuca. Despliego tu vientre. Dunas celestes. Tu cabellera es manojo de llamas. Tus ojos un huracán de arena. Abro tu lengua atorada y calmo mi sed. Es hostia para mi boca infiel. Cáliz para mi boca hereje.

Renuncio al deber. A la razón. Soy adorador en lugares de exceso. Un mendigo en el umbral de tu taberna. Bebo de manantiales que alucino. Opio y vino. Olfateo tus aromas opiáceos. Muerdo tus embriagantes resquicios.

Soy el harapiento que lava y besa tus pies. Quiero beber. Y seguir bebiendo. Y beber de nuevo. Y disolverme bajo la ósmosis de la embriaguez.

Soy el amante del amor. Bañado de lana. Bañado de suciedad y de fango

El que se postra sobre tu cuerpo. Lugar de veneración. Lugar de oración.

 


Fragments pour l'aimée


1.

Ils appartiennent à l’imaginaire de la souffrance. Celui qui rend humble. Celui qui invoque le goût des mots et des idées. D’où ce lien viscéral. D’où ce besoin de parler, de se dire, de se raconter, de se déverser en l’autre. Elle n’est pas son âme-sœur. Elle est bien plus que cela. Elle descelle la part inconnue de son être et l’étale au grand jour, sur un parterre de lumière, façonnée par sa peau.

14.

À l’aube, avant que la lumière ne m’engorge de sa sève, je m’exerce à l’ascèse des mots, je sculpte la matière épaisse de tous vos fragments, en nombre infini, je les transmue en poème, j’en fais un poème, un poème du dénuement, un poème dépouillé de tout ce qui n’est pas vous, un poème qui renferme – sans les aléas du désir - votre substance.

15.

Ce ne sont que des mots, mots voyageurs, en quête d’autres mots, mots mêlés aux vôtres, mots qui savent cette terre d’accueil, mots qui s’y enracinent, mots que les vôtres ensemencent, mots devenus d’autres mots, mots ensuite qui prolifèrent, mots qui déflagrent, mots qui tissent un voile, le vôtre, mots qui fondent la constellation d'autres mots, les mots de notre parole toujours amoureuse.

29.

La chair faite mots, chair qui ne m’appartient pas, dont la traversée est de se réincarner en mots car c’est ainsi que j’écris, je vais au bout de ma chair, à ses extrémités, cette chair qui n’est que d’une légitimité, d’être des mots, chair que l'impulsivité des mots dénoue, bientôt une écorce vide, j’écris ma chair, j’en fait des mots, je me désincarne afin que les mots soient, afin que les mots deviennent toi, afin que les mots se transmuent en toi.

30.

Je sais le lyrisme facile de la mer mais vous êtes la mer, vous l'êtes, vous me déchirez selon ses bacchanales, vous êtes la mer, vous l'êtes, vous semez sur la pierre argileuse ses aurores, vous êtes la mer, vous emplissez le temps des nuances de la consolation, vous êtes la mer, vous l'êtes, vous énoncez le décours de toute misère, vous êtes la mer et je me perds en vous, vous êtes la mer, vous l'êtes et je ne suis qu’un esquif à la dérive sur un corps apatride.

31.

Vous êtes de la nuit, votre corps disséminé dans les vendanges des étoiles, votre corps, une auréole faite de cendres, je ne cesse de vous contempler, je ne suis alors plus que ce regard en quête de l’autre, vous êtes de la nuit, parfois vous y dispersez autant de filaments de lave, je les cherche, parfois ils éclosent dans mes prunelles, parfois vous les habillez d’un voile, qui n’est que ce corps, que le sang n’a pas encore scellé.

37.

Urgence d'un corps qui sait la violence de la déchéance à venir, je veux dans l'instant m'engouffrer, être le profanateur de ces tombes qui nous invitent aux convenances d'on ne sait quel au-delà, il n'est que l'instant, allons-nous en, je ne sais trop ou, allons-nous en, les scribes de l'émerveillement en soi, dans l'instant, je veux vivre, enfin vivre, vivre à perpétuité dans l'instant, aide-moi, aide-moi, tends-moi les franges de ton voile, je les nouerai autour de mes ombres et de ma peau et on s'en ira, on s'en ira.

Je ne crains plus votre silence. Vous pouvez ne plus me parler. Ou choisir de m’ignorer. Vous ne le ferez pas, j’en suis certain. Mais votre silence ne m’effraie plus. Je n’ai plus peur. Je sais la force de ce lien. Il est semblable à un archipel et j’en suis le cartographe. Il est fait de la matière de la mémoire, du partage, du désir, de nos émotions. Rien, ni personne ne peut achever cet archipel.

 

Fragmentos para la amada

1.- Ellos pertenecen al imaginario del sufrimiento. Aquel que vuelve humilde. Que invoca el sabor de las palabras y las ideas. De allí el vínculo visceral. De allí esta necesidad de hablar, de decirse, de narrarse, de verterse en el otro. Ella no es su alma gemela. Es mucho más que eso. Descubre la parte desconocida de su ser y la expone a la luz del día en un prado de luces, una parte que su piel ha moldeado.

14
En el alba, antes de que la luz me ahogue con su sabia, practico la ascesis de las palabras, esculpo, al infinito, la espesa materia de todo sus fragmentos, los transformo en poemas, compongo uno, un poema de la miseria, un poema despojado de todo lo que no es usted, un poema que encierra —sin azar del deseo— su esencia.

15
No son sino palabras, palabras andarinas, en busca de otras palabras, palabras mezcladas con las suyas que conocen esta tierra de acogida, palabras que en ella se arraigan, palabras que las suyas fecundan, palabras convertidas en otras palabras, palabras que luego proliferan, palabras que se incendian, que bordan un velo, palabras que funden la constelación de otras más, palabras de nuestra palabra siempre amorosa.

29
La carne hecha de palabras, carne que no es mía y cuya travesía es la de reencarnar en palabras pues así escribo yo: voy al fondo de mi carne, hasta sus extremidades, esta carne que tiene sólo una legitimidad, la de pertenecer a las palabras, carne cuya impulsividad de las palabras desanuda, pronto una corteza vacía, escribo mi carne, hago palabras con ella, me descarno para que las palabras existan, para que las palabras se conviertan en ti, para que las palabras se transformen en ti.

30
Conozco el fácil lirismo del mar pero usted es el mar, lo es, me desgarra al ritmo de sus bacanales, usted es el mar, lo es, siembra sus auroras en la piedra fangosa, usted es el mar, colma el tiempo con los matices del consuelo, usted es el mar, lo es, pronuncia el menguante de toda miseria, usted es el mar y en usted me pierdo, usted es el mar, lo es y sólo soy un esquife a la deriva en un cuerpo apátrida.

31
Usted pertenece a la noche, su cuerpo diseminado en las vendimias de las estrellas, su cuerpo, una aureola de cenizas, no dejo de contemplarla, sólo soy esta mirada en busca de un otro, usted es la noche, usted dispersa a veces tantos filamentos de lava, y los busco, a veces eclosionan en mis pupilas, a veces usted los cubre con un velo, un cuerpo que la sangre aún no ha sellado.

37
Urgencia de un cuerpo que conoce la violencia de la decadencia porvenir, quiero engullir en el instante, ser el profanador de estas tumbas que nos invitan a las costumbres de quien sabe qué allende, no hay más que el instante, marchémonos, no sé adónde, marchémonos, escribas de la admiración misma, en este mismo instante, quiero vivir, vivir por fin, vivir a perpetuidad en el instante, ayúdame, ayúdame, tiende hacia mí las orlas de tu velo, las anudaré alrededor de mis sombras y de mi piel y nos iremos, nos iremos.
Ya no temo al silencio. Usted puede no hablarme más. O decidir ignorarme. No lo hará, estoy seguro. Su silencio no me asusta. Ya no temo. Conozco la fuerza de este vínculo. Se asemeja a un archipiélago y yo soy su cartógrafo. Está hecho de la materia de la memoria, de la comunión, del deseo, de nuestras emociones. Nada ni nadie puede culminar este archipiélago.